Dix siècles d'histoire et de neige |
L'abbé Pierre Chanoux fut parmi les prêtres qui marquèrent la vie de l'hospice. Fils d'un paysan du val d'Aoste, il se consacra, de 1859 à 1909, à l'accueil des démunis. En 1897, ce botaniste érudit créa un " jardin d'acclimatation pour la flore alpine ", dénommé plus tard la " Chanousia ". Sous les rocailles, trois cents espèces menacées et précieuses trouvèrent comme les pauvres, un refuge pour survivre. Au décès de l'abbé, la Chanousia passa de 2000 à 5000 essences végétales grâce à la continuité assurée par Lino Vaccari. Tombé en décrépitude, la Chanousia et le site furent restaurés en 1970 par une association internationale. |
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A l'Ouest du col du Petit-St-Bernard qui réunit la Tarentaise et le Val d'Aoste à 2188 m d'altitude, trône le témoin de dix siècles d'Histoire : l'hospice du Petit-St-Bernard.
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Entre France et Italie, la place des cols fut stratégique depuis la plus haute antiquité. Voie de passage et barrière à la fois, pour les marchands, les voyageurs et les pèlerins, la route de Colonne-Joux puisa sa dénomination dans la croyance populaire, persuadée que le Dieu Joux (Jupiter) y répandait son enfer. Dans les faits, le col resta un mauvais coupe-gorge jusqu'au Moyen-âge. Dès cette époque, il prit le nom du Saint qui, selon les récits populaires toujours, terrassa le Malin : Saint-Bernard. Né au début du XIème siècle dans une famille noble du Val d'Aoste, le prédicateur usa de son rôle d'archidiacre au diocèse d'Aoste pour ériger deux hospices aux pieds des cols du Grand-St-Bernard et du Petit-St-Bernard où là, il y adjoint une église dédiée au patron des marchands : Saint-Nicolas.
Témoin de la tradition hospitalière des Alpes, l'hospice du Petit-St-Bernard (érigé à la fin du XIème siècle sous la tutelle du diocèse valdôtain) suivit et parfois subit dans son aspect, sa morphologie et son occupation les heures marquantes de l'Histoire. Destiné à la sécurité des voyageurs, des pauvres et des pèlerins, il fut ainsi reconstruit en 1141 sur décision de l'archevêque de Tarentaise, Pierre II. Le lieu gagna alors en autonomie avant que la gouvernance des Ducs de Savoie, particulièrement Amédée IX ne l'attribue aux chanoines en 1466.
Pillé au rythme des guerres et des invasions, ce véritable paquebot des neiges, long de 35 m, large de 12 m, haut de quatre étages connut un plus étonnant conflit avec son voisin du Grand-St-Bernard. Agacé par cette opposition, le prince de la Maison de Savoie plaça en 1752 l'hospice du Petit-St-Bernard sous l'ordre des Saints Maurice et Lazare, qui en est toujours propriétaire. Hormis durant la Révolution et l'Empire, les prêtres assurèrent une permanence jusqu'à la seconde guerre mondiale.
Ce formidable héritage traversa avec courage dix siècles sous une température moyenne annuelle de 1°C, des saisons de rigueur infligeant 108 jours de précipitations dont la moitié enneigés. Les habitués surnommèrent même le vent qui cingle les pierres et la peau : " le Saint-Bernard " !
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L'association du Petit-St-Bernard
créée en 1993 et dirigée par Jean-Luc Penna, président et Jean Masset, vice-président délégué, épaule un ambitieux projet global de réhabilitation de l'hospice. Aidée par le SIVOM de Haute-Tarentaise, le Département, la commune italienne de La Thuile et l'Ordre Mauricien, propriétaire, l'association, forte de 180 membres (italiens, américains et français - dont 50% de Savoyards) accompagne les étapes de cette restauration. "Nos objectifs sont clairs, indique Jean Masset. Rappeler la vocation spirituelle et religieuse de l'hospice, sa destination d'accueil, maintenir son volume et sa place transfrontalière". Les opérations " Cols Verts " puis Interreg II ont ainsi permis l'aménagement à l'étage d'un point d'accueil du public et d'un musée, d'une grande salle d'animation au rez-de-chaussée, d'un gîte d'étape au second niveau. Le 3ième étage accueille un espace européen de rencontres et une salle de restauration avec cuisine. Enfin, la tour météo érigée en 1920 a elle-aussi été rénovée par l'association, avec le concours de Météo France.
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