Les pâturages d’altitude au coeur de l’alimentation des races laitières
Pâturage du Beaufortain - © 123 Savoie
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Sur les pays de Savoie, 90 % de la surface agricole (soit 310.000 ha) sont en herbe, les prairies constituant ainsi le trésor caché de ce territoire. Parmi ces 310.000 ha, on compte 220.000 ha d’alpages, vastes espaces naturels destinés à la pâture des troupeaux. Pour répondre aux cahiers des charges définis par les labels AOP et IGP, les races laitières (vaches et chèvres) qui vont fournir le lait des Fromages des Savoie doivent se nourrir prioritairement de l’herbe présente sur ces pâturages d’altitude. En effet, le relief accidenté, le climat |
particulier et l’altitude (
jusqu’à 2.500 m) donnent une végétation spécifique, qui confère au lait des caractéristiques particulières. Si ces vastes espaces naturels constituent une richesse, ils impliquent également de nombreuses contraintes. Pour parvenir à gérer les ressources d’herbe au rythme des saisons, les montagnards et les races laitières ont dû s’adapter à ces spécificités.
Les races laitières de vaches et de chèvres sont élevées et nourries selon un cahier des charges très précis, spécifique à chaque fromage. Ainsi, les proportions minimales d’alimentation en herbe fraîche et en foin sont définies. L’achat de foin à l’extérieur de la zone Savoie ainsi que le recours à des aliments complémentaires sont limités et strictement réglementés. Par ailleurs, bien que la réglementation générale ne l’impose pas, les producteurs s’interdisent l’utilisation de toute nourriture OGM, dans le souci constant de mettre en oeuvre de bonnes pratiques agricoles.
Race Abondance - © 123 Savoie
| | Les vaches : l’Abondance, la Tarine (originaires des Pays de Savoie) et la Montbéliarde (Jura) sont particulièrement adaptées aux zones de montagne et aux variations de température. Leur facilité à gravir des dénivelés importants ne s’explique pas uniquement par leur prédisposition génétique : les veaux sont éduqués dès le plus jeune âge à gravir des pentes de plus en plus raides. Leur nombre est évalué entre 80.000 et 90.000.
Les chèvres : la reine incontestée des alpages de Savoie est l’Alpine. On en compte 12.000 têtes. |
Le lait cru, matière première des Fromages des Savoie
L’une des spécificités majeures des Fromages des Savoie est la fabrication à base de lait cru, c’est-à-dire que le lait ne subit aucun traitement avant sa transformation. Travailler au lait cru permet de conserver les flores microbiennes présentes naturellement dans le lait : plusieurs dizaines d’espèces bactériennes vont ainsi participer à établir les caractéristiques sensorielles et nutritionnelles des Fromages des Savoie, qui seront développées lors des étapes de salage et d’affinage. L’utilisation du lait cru, produit riche et complexe, fait aujourd’hui figure d’exception dans la production fromagère. Il implique un suivi sanitaire rigoureux, l’affinage étant le seul mode de conservation autorisé.
Tome des Bauges AOP - © 123 Savoie
Tomme de Savoie IGP - © Pedro Studio Photo
| | Un savoir-faire transmis de génération en génération
Pour répondre aux cahiers des charges imposés par les labels de qualité, la fabrication des Fromages des Savoie est soumise au strict respect des méthodes de fabrication nées de pratiques ancestrales et à l’utilisation de matériaux traditionnels. Ainsi, tous les Fromages des Savoie sont des pâtes pressées, ce qui signifie que le caillé est pressé au moment du moulage, afin d’éliminer le maximum de lactosérum (liquide jaune pâle restant après la coagulation du lait). On distingue ainsi :
- Les pâtes pressées non cuites (Tome des Bauges, Tomme de Savoie, Chevrotin et Reblochon de Savoie), qui doivent être consommées rapidement.
- Les pâtes pressées semi-cuites (Abondance) et cuites (Beaufort et Emmental de Savoie), qui peuvent être conservées plusieurs mois, d’où l’appellation de "fromages de garde". |
La filière : une organisation collective
La production des Fromages des Savoie est structurée par une organisation professionnelle collective, source de valeur ajoutée. Elle regroupe l’ensemble des acteurs impliqués dans la fabrication des fromages :
- les éleveurs, producteurs de lait.
- les fromagers : fermiers, artisans, coopératives et entreprises.
- les affineurs.
Une fois le lait recueilli, la fabrication des fromages se fait en ateliers, très différents par leur taille et leur structure :
- à la ferme (fromage fermier) : l’éleveur transforme lui-même le lait de son troupeau en fromage. L’affinage pourra être assuré directement par lui ou par un affineur.
- en atelier collectif : le lait est collecté dans les fermes, puis transformé dans un atelier collectif, géré par une coopérative ou un artisan (PME), et plus rarement en Savoie dans quelques entreprises privées.
La production fromagère des Savoie représente un poids culturel et économique indéniable. Ce sont plus de 2.000 producteurs de lait pour 325 millions de kg de lait (dont 80 % transformé sous signe de qualité), 60 fromageries collectives et plus de 340 ateliers fermiers ou en alpage. La quantité de lait produit est négligeable par rapport à l'ensemble de la France : elle représente 1,5 % de la production nationale de lait, mais 15 % de la production de fromages A.O.C. et I.G.P. de France. 32.000 tonnes de fromage sous signes de qualité sont produites chaque année en Pays de Savoie.