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Alphonse de Lamartine

Alphonse de Lamartine

Un grand poète qui mourut ruiné

Alphonse de LamartineAlphonse Marie Louis de Prat de Lamartine est né à Mâcon le 21 octobre 1790. Il était le fils de Pierre de Lamartine et d’Alix de Roys et avait six sœurs. Il mourut le 28 février 1869 à Paris.

Ses parents étaient des aristocrates croyants. Son grand père avait exercé, autrefois une charge dans la Maison d’Orléans. Sa famille se constitua par des alliances et des acquisitions, un très important patrimoine immobilier dans le Maçonnais et le Dijonnais, ainsi qu’en Franche Conté. Mais ce patrimoine sera largement épuré par la mauvaise gestion du grand père d’Alphonse et par les conséquences de la Révolution.

En 1797, la famille de Lamartine ira s’installée dans leur maison entourée de vignes à Milly près de Mâcon. Alphonse grandit parmi les paysans employés au vignoble. Il reçut une éducation et une foi catholique stricte. En 1801, il fut envoyé à la pension Puppin, à Lyon, où il fit une fugue. Les gendarmes l’y ramenèrent et il dut finir son année scolaire. Puis sa mère le mit en pension au collège des Jésuites de Belley, où il suivra les classes de troisième, seconde en rhétorique et philosophie. Brillant élève, il commença à s’enthousiasmer pour l’étude littéraire : Virgile, Horace et Chateaubriand. De cette période naîtra sa vocation poétique. Il nouât des amitiés qui seront pour lui de solides soutiens, surtout celle d’Aymon de Virieu, avec qui il échangea une correspondance ininterrompue jusqu’à la mort de celui-ci en 1841.

Après le second retour des Bourbons au pouvoir, il gagna Chambéry invité par Louis de Vignet, neveu des frères de Maistre…

En 1811, la famille d’Alphonse rassemblera des fonds pour permettre à leur fils de se faire remplacer dans l’armée de l’Empire. Il n’était pas question, dans le milieu familial de servir sous les ordres de « l’usurpateur Napoléon ». Alphonse ira à Florence, Rome puis Naples chez un cousin maternel, de décembre 1811 à avril 1812, dans une manufacture de tabacs. Il y vécut une grande histoire d’amour avec Antoniella Jacomino qui deviendra la « Graziella » dans ses œuvres futures. A son retour à Milly, courant 1813, il devient maire, grâce à l’aide de son père. Il fera ainsi involontairement ses débuts dans la carrière politique. Il écrivit cette même année Médée, une tragédie. A la chute de Napoléon, les Bourbons revinrent au pouvoir. Cette nouvelle fut accueillie avec enthousiasme chez la famille de Lamartine. Alphonse alors âgé de 24 ans obtint, grâce à son père, une place dans les gardes du corps de Louis XVIII, en garnison à Beauvais. Le retour de Napoléon en juin 1815, lui fit abandonner son poste, afin d’échapper à une conscription impériale pendant les cents jours. Sa famille le fit passer en Suisse, puis sur la rive savoyarde du lac Léman. Puis ensuite il revint à Milly. Il fit souvent des séjours à Paris où il s’adonna au jeu et contracta de lourdes dettes.

Seul garçon de la famille il reçut en héritage les domaines de ses parents. Sans y être obligé il voulut dédommager ses sœurs par des rentes. Après le second retour des Bourbons au pouvoir, il gagna Chambéry invité par Louis de Vignet, neveu des frères de Maistre. Mais au sein de la famille règne alors un certain malaise. Son oncle aîné, régnait sur la famille et était un proche de l’Empire. Alphonse s’éloigna alors et s’exila au bord du lac du Bourget dans la ville d’Aix-les-Bains.

Pension Chabert lieu de rencontre entre Alphonse de Lamartine et Mme Julie Charles

Pension Chabert lieu de rencontre entre Alphonse de Lamartine et Mme Julie Charles

En 1816, il sauva une jeune femme créole, Julie Charles, d’un naufrage sur le lac du Bourget.  Elle était mariée et malade de la tuberculose. Un amour spirituel naîtra entre eux, fait de rencontres furtives et de longues et fébriles attentes. Il fréquenta le salon de Julie à Paris de janvier à mai 1817. Au court de l’été de cette même année, il se rendit à Aix-les-Bains où il l’attendra en vain. Lamartine revient seul revoir les lieux qu’il avait visités autrefois avec elle. Surpris de trouver la nature toujours semblable à elle-même et indifférente, il souhaita qu’elle garde au moins le souvenir de leur bonheur passé et écrivit alors le poème « le Lac », évoquant l’angoisse d’un amour en danger et la tristesse occasionnée par la fuite du temps. L’état de santé de Julie se détériora et elle mourut le 18 décembre 1817 de phtisie. Alphonse l’apprit à Milly le jour de Noël. Il fut marqué par cette perte et elle sera la source de l’inspiration des « Méditation poétiques ». En 1818 sa tragédie « Saûl » fut refusée par Talma, de la Comédie Française. Ceci le fit renoncer à écrire des tragédies et il retrouva son inspiration pour les poèmes.

Marianne Elisa Birch

Marianne Elisa Birch

En 1819, il fut présenté à Miss Marianne Elisa Birch, une jeune anglaise protestante, rencontrée lors du mariage de sa sœur Césarine. Juste après il eut une liaison de cinq mois avec la Princesse Léna de Larch. Au cours du mois d’août 1819, il demanda Miss Birch en mariage lors d’une retrouvaille à Aix-les-Bains.

En mars 1820 la parution des « Méditations poétiques » connaîtra un grand succès.

Le château de Caramagne fut loué en 1820 à la Marquise de La Pierre, par Madame Birch, dont la fille allait devenir la femme du poète Alphonse de Lamartine. Leur contrat de mariage fut signé dans le grand salon du château le 25 mai 1820 et la cérémonie religieuse se déroula à la Sainte-Chapelle du château ducal de Chambéry. Lamartine devient attaché d’ambassade à Naples.

Château de Saint-Point

Château de Saint-Point

En 1821, le couple quitta Naples pour Rome où en février naîtra leur premier fils, Alphonse. Ils viendront ensuite s’installer au château de Saint-Point, dans le Maçonnais où naîtra en juin de l’année suivante leur fille Julia. En novembre survint le décès de leur fils Alphonse. En 1823, il publia « La mort de Socrate » et les « Nouvelles méditations poétiques ». Il vit sa demande d’admission à l’Académie Française rejetée en 1824  et cette même année il enterra ses sœurs Césarine et Suzanne. En 1825, la mort de Lord Byron, lui inspira les 2000 vers, repartis en 49 sections « Le chant du pèlerinage d’Harold ». Charles X, Roi de France, lui confiera ainsi qu’a Victor Hugo, la croix de la Légion d’Honneur et sera nommé secrétaire d’ambassade à Florence puis chargé d’affaires de France en Toscane. Son retour en France en 1828, le plongea dans une grande tristesse, il écrivit « Novissima Verba » poème de désespoir, sous le tire « Mon âme est triste jusqu’à la mort ».

Mère de Lamartine

Mère de Lamartine

Julia, fille de Lamartine

Julia, fille de Lamartine

A Paris, en 1829, il rencontra Chateaubriand, Hugo et Sainte Beuve. En novembre grâce à l’appui de Chateaubriand il fut reçu à l’Académie Française, mais son bonheur sera de courte durée car survint la mort de sa mère. En 1830, il publia les « Harmonies poétiques et religieuses ». Il abandonna aussi sa carrière diplomatique et présenta sa démission au Roi Louis-Philippe et se lança dans la politique. Il connaîtra trois échecs comme candidat député. Alphonse publia cette même année les odes « Contre la peine de mort » puis l’année suivante « les Révolutions et Némésis ». Après ses échecs politiques il réalisa un vieux rêve. En 1832 il embarqua sa famille et quelques amis pour un long voyage en Orient. Il visita le tombeau du Christ en terre Sainte. Malheureusement sa fille Julia mourut à Beyrouth le 6 septembre 1832. Quinze ans après la mort de Julie Charles, dix ans après celle de son fils Alphonse et trois ans après celle de sa mère, Lamartine fut de nouveau frappé par le deuil. Sa foi religieuse vacilla. Il hurla son chagrin, son désespoir et sa révolte contre Dieu dans « Gethsémani ou La mort de Julia ». Ces poèmes seront publiés en 1835 dans « Voyage en Orient ».

En janvier 1833, Alphonse sera élu député de Bergues dans le Nord. Il apprit cette élection en avril alors qu’il était encore en Orient. Il ne prit ses fonctions de député qu’en décembre. Il publia en 1834 « Les Destinées de la poésie » dans la revue des Deux Mondes. L’approfondissement de sa propre philosophie chrétienne le lança dans la création d’une œuvre vouée à décrire « l’histoire de l’âme humaine ». Il publia « Jocelyn » inspiré par la vie de l’Abbé Dumont curé de Milly. En 1838, il devint député de Mâcon et se déplaça lentement au fil du temps vers la gauche politique, allant jusqu’à devenir le tête de file des révolutionnaires en 1848. Son père mourut en 1840. Huit ans plus tard lors de la chute de Louis-Philippe et de la proclamation de la Seconde République, Lamartine fit partie de la Commission du gouvernement provisoire. Il fut Ministre des Affaires Etrangères de février à mai 1848. Il mena une politique modérée. Il signa le décret d’abolition de l’esclavage du 27 avril 1848. En décembre de la même année, Lamartine obtint à l’élection présidentielle, 0.28% des voix ce qui porta au pouvoir Louis Napoléon Bonaparte.

Tombeau de Lamartine

Tombeau de Lamartine

La fin de sa vie fut marquée par des problèmes d’argent, dus à sa générosité. Il revint un temps à ses souvenirs de jeunesse pour écrire des poèmes, mais il dut très vite revenir à du concret. La qualité de ses œuvres s’en ressenti. A la fin des années 1860, il fut quasiment ruiné et dut vendre sa propriété à Milly et accepter l’aide d’un régime qu’il réprouva. En 1867 il fut frappé d’Apoplexie et perdit la raison et l’usage de la parole. Il mourut deux ans plus tard suite à une seconde apoplexie le 28 février 1869.

Le Lac

Portrait de LamartineAu court de l’été 1817, Alphonse de Lamartine se rendit à Aix-les-Bains où il attendra Julie Charles en vain. Lamartine revient seul revoir les lieux qu’il avait visités autrefois avec elle. Surpris de trouver la nature toujours semblable à elle-même et indifférente, il souhaita qu’elle garde au moins le souvenir de leur bonheur passé et écrivit alors le poème « le Lac », évoquant l’angoisse d’un amour en danger et la tristesse occasionnée par la fuite du temps.

Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,
Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
Ne pourrons-nous jamais sur l’océan des âges
Jeter l’ancre un seul jour ?

Ô lac ! l’année à peine a fini sa carrière,
Et près des flots chéris qu’elle devait revoir,
Regarde ! je viens seul m’asseoir sur cette pierre
Où tu la vis s’asseoir !

Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,
Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
Ainsi le vent jetait l’écume de tes ondes
Sur ses pieds adorés.

Un soir, t’en souvient-il ? nous voguions en silence,
On n’entendait au loin, sur l’onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.

Tout à coup des accents inconnus à la terre
Du rivage charmé frappèrent les échos ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m’est chère
Laissa tomber ces mots :

« Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !

« Assez de malheureux ici-bas vous implorent,
Coulez, coulez pour eux ;
Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
Oubliez les heureux.

« Mais je demande en vain quelques moments encore,
Le temps m’échappe et fuit ;
Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l’aurore
Va dissiper la nuit.

« Aimons donc, aimons donc ! de l’heure fugitive,
Hâtons-nous, jouissons !
L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ;
Il coule, et nous passons ! »

Temps jaloux, se peut-il que ces moments d’ivresse,
Où l’amour à longs flots nous verse le bonheur,
S’envolent loin de nous de la même vitesse
Que les jours de malheur ?

Eh quoi ! n’en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !
Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,
Ne nous les rendra plus !

Eternité, néant, passé, sombres abîmes,
Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
Que vous nous ravissez ?

Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !
Vous, que le temps épargne ou qu’il peut rajeunir,
Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
Au moins le souvenir !

Qu’il soit dans ton repos, qu’il soit dans tes orages,
Beau lac, et dans l’aspect de tes riants coteaux,
Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
Qui pendent sur tes eaux.

Qu’il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,
Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
Dans l’astre au front d’argent qui blanchit ta surface
De ses molles clartés.

Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu’on entend, l’on voit ou l’on respire,
Tout dise : Ils ont aimé !

Alphonse de Lamartine – Les Méditations poétiques


La Grotte de Lamartine

La grotte de Lamartine © 123 Savoie

La grotte de Lamartine © 123 Savoie

En prenant la direction de la crique et du petit port de Bourdeau, vous allez atteindre un petit sentier, avec des escaliers. Ce chemin vous mènera à une petite plage de galets, où se trouve la grotte de Lamartine, célèbre poète romantique du XIXème siècle.
Dans cette grotte polie par le temps, Lamartine laissait errer son regard et voguer son imagination vers les flots du lac du Bourget : immiscez-vous dans ses pensées et essayez d’imaginer les moments poétiques qu’il a pu vivre.

Se mettant à l’abri dans sa grotte, il évoqua « les sombres abîmes », « les rochers muets » et « les noirs sapins » du lac.

 

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3 commentaires

Gerald Simard 2 février 2024 - 22 h 24 min

Bonjour,

Je me risque, vous écrivez sur Alphonse de Lamartine… Si vous voulez me donner votre avis! Merci

Même si le poème l’Automne, édité vers 1820 en Europe, Alphonse de Lamartine à t-il vraiment écrit ce poème? Cache-t-il un message dans ce poème? Combien de poème aussi parfait que celui-là, l’auteur a-t-il était capable d’écrire?

Selon les définitions du XIX siécle, les mots de ce poème parfait, cache un message.

J’ai écrit ce blogue, il y a 10 ans. Et je suis toujours convaincu de mon interprétation. J’ai pris mon interprétation et j’ai créé un poème explicatif.

http://automne-alphonse-de-lamartine.blogspot.com/2013/12/lautomne-voici-une-brevehistorique.html?m=1

Bonne lecture

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Babonneix Jean-Michel 26 décembre 2014 - 16 h 59 min

Bonjour,

Je vous remercie pour cette biographie détaillée d’Alphonse de Lamartine.

Mon grand-père, Léon Babonneix, décédé en 1943, bien que professeur de médecine,
était un spécialiste reconnu de l’œuvre de l’auteur du Lac.

Il a écrit plusieurs ouvrages sur sa vie et son œuvre,
ouvrages que j’ai pu apercevoir jadis dans la bibliothèque familiale.

Aujourd’hui je ne sais pas ce qu’ils sont devenus,
par contre je pense qu’ils sont restés dans la famille.

Je vous souhaite une bonne fin d’année et vous présente mes meilleurs vœux pour 2015.

Cordialement

Jean-Michel Babonneix

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